Nouvelle-Calédonie / Société

Ave Maria : le village est vide
La dernière famille wallisienne a quitté le
village de l’Ave Maria, hier, en début d’après-midi. Relogée à
Magenta, elle espère aujourd’hui construire une nouvelle vie. Malgré
la colère et la tristesse.
D’habitude, Yvette Holonoa n’a pas la langue dans sa poche. Sa
gouaille et son caractère affirmé sont légendaires. A 41 ans, elle a
même résisté jusqu’au dernier moment avant d’accepter de quitter
l’Ave Maria avec son mari et son fils de 18 ans. Mais aujourd’hui,
Yvette a perdu un peu de sa verve. Le visage est sombre. Les mains
tremblent légèrement. Le jour J est arrivé. Elle doit partir.
Quitter le village où elle a vécu pendant 37 ans.
Direction Magenta
« On a fait les fortes
têtes malgré les tirs et les barrages. On est même restés trois
semaines coupés du monde. Mais on ne voulait pas partir dans
n’importe quelle condition ! », lâche-t-elle avec une pointe de
fierté en regardant les déménageurs de la Province sud empiler les
cartons dans les camions. Derrière elle, sa belle villa F6 a
perdu de son faste. Plus de toit, plus de fenêtres...Tout ce qui
pouvait être récupéré a été soigneusement démonté. « J’ai vraiment
mal au cœur en regardant ça », murmure-t-elle. « On a construit
cette maison de 250 m2 en 1992 et c’est vraiment dur de la laisser.
On se sentait bien ici, au milieu de la nature. »
Dans un « cagibi »
A 12 heures, les
premiers camions sont prêts. Yvette grimpe dans son 4X4 pour
rejoindre son nouveau logement : un appartement F3 situé sur les
hauts de Magenta. Le décor n’est plus le même. La résidence
compte une centaine d’appartements, sans terrasse ni balcon. « C’est
vrai que nous avons été beaucoup aidés. Il n’y a rien à redire. Mais
j’ai vraiment l’impression de me retrouver dans un cagibi. L’espace
va me manquer ! », souligne-t-elle, résignée. Et puis Yvette se
sent déjà un peu seule ici. « J’avais l’habitude d’être entourée de
ma famille, de mes amis. Il va falloir trouver de nouveaux repères.
Ce n’est pas évident... » Malgré sa tristesse et sa colère,
Yvette essaie maintenant de regarder l’avenir. « J’espère rester
seulement six mois dans cet appartement. Je veux rapidement avoir un
nouveau terrain pour construire une nouvelle vie! »
Xavier Serre
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